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Yoga et gratitude

Yoga et gratitude, contours d'un concept

La gratitude en yoga est une valeur ou une attitude souvent évoquée. Elle se rapproche du concept philosophique de Samtosha, le contentement qu’on retrouve dans les Yoga-Sutra de Patanjali. Ce texte est généralement considéré comme la base philosophique du yoga postural moderne. Il s’agit d’une sorte de “manuel” composé de 195 aphorismes, qui présente un système global visant la libération et l’union, le yoga. Il y est décrit comme un chemin vers un “état de conscience pure”, de dépassement de la réalité subjective telle que nous la voyons. Ce chemin emprunte 8 piliers. Les deux premiers sont les règles de conduites morales et sociales, les yamas ainsi que les règles d’éthique plus personnelles, les niyamas. Parmi ces derniers, on trouve samtosha, le contentement. Personnellement, j’ai eu beaucoup de mal à bien définir les contours de ce concept. Car pour le comprendre et tenter de le mettre en pratique, on peut vite dériver vers des techniques de développement personnel (particulièrement à la mode) plus ou moins questionnables (de mon point de vue, en tout cas). Alors, que signifie réellement pratiquer la gratitude en yoga ?

Qu'est-ce que la gratitude en yoga ?

Le contentement, samtosha

Ce concept est fondateur dans la philosophie du yoga, à commencer par les Yoga Sutras de Patanjali. Mais il est également déjà développé en filigrane dans des textes plus anciens comme la Bhagavad Gita. C’est un poème épique et mythique fondateur de l’hindouisme. Il définit le yoga comme la recherche d’équanimité en toute chose et l’art d’agir en se détachant des fruits de son action. On comprend donc aisément que la conséquence de ce détachement est une forme de contentement.

C’est aussi un concept présent chez de nombreux philosophes qui ont réfléchi sur le bonheur. C’est par ailleurs, un principe moral fort dans la religion chrétienne (et probablement dans d’autres monothéismes).

Le Robert en donne une définition très courte qui est la satisfaction. Le Larousse quant à lui définit le contentement de deux façons : 

  • en tant qu’action : celle de contenter, de satisfaire un désir ou un besoin ;
  • en tant qu’état : celui d’un sentiment intérieur qu’éprouve une personne qui ne désire rien de plus.

Le contentement, c’est globalement le sentiment profond et durable d’une personne qui éprouve de la satisfaction face à ce qui lui arrive ou à ce qu’elle possède. C’est ainsi l’idée de se satisfaire de ce que l’on a. 

Est-ce que vous sentez déjà poindre les grands questionnements que ce concept a pu m’amener ? 

La gratitude vs le contentement

Un autre concept fait écho à cette définition. Il peut vraiment paraitre galvaudé tellement il est utilisé aujourd’hui à tort et à travers. Il s’agit de la gratitude.

C’est une technique, développée par la psychologie positive qui considère que se recentrer sur les aspects positifs de notre quotidien nous aide à développer notre bien-être physique et mental. Cette idée repose entre autre sur le biais cognitif de négativité. C’est un phénomène qui fait que les individus sont davantage marqués par les expériences négatives que par les positives, qu’ils prennent davantage en compte les informations négatives que les positives, qu’ils en tirent plus d’enseignements et qu’ils les utilisent plus souvent.

Pour contrer cette tendance naturelle de notre cerveau à retenir tout ce qui ne va pas dans une journée, malgré tout ce qui a aussi pu aller, la psychologie positive préconise de travailler sur notre sentiment de gratitude. 

Rebecca Shankland, chercheuse en psychologie, le définit comme “un sentiment que l’on ressent lorsqu’on perçoit qu’on a été bénéficiaire d’un don ou d’un soutien d’une autre personne, voire même de la nature, ou de la vie plus généralement”. Cette pratique de la gratitude peut avoir des effets sur notre état psychologique et la façon dont nous abordons ensuite des choses plus désagréables. 

C’est un concept qu’on peut retrouver en méditation, plutôt sous l’angle de l’acceptation. Cette pratique invite en effet à observer notre manière de réagir aux évènements et à mieux accepter ceux qu’on ne peut pas changer. Ce sont des thématiques abordées particulièrement par des personnes comme Christophe André, un psychiatre qui a considérablement développé l’usage médical de la méditation dans le traitement des dépressions, ou Fabrice Midal, philosophe et écrivain célèbre.

Comment pratiquer la gratitude en yoga ?

Pourquoi la gratitude peut poser problème ?

Le problème, c’est que ces concepts de gratitude et de contentement ont été aussi repris par des techniques de développement personnel dans des théories beaucoup plus simplistes. À mon sens, le souci que posent ces techniques de développement personnel est qu’elles surestiment considérablement le pouvoir de ces sentiments. C’est, selon moi, le grand biais du développement personnel : se concentrer sur l’individu et tout ce qu’il peut faire à son niveau pour “transformer sa vie” tout en oubliant, effaçant, voire niant, que des dynamiques sociales et collectives entrent aussi en jeu dans ce qui nous arrive individuellement. 

C’est le gros problème, toujours selon moi, de la théorie de la loi de l’attraction, qui est une croyance (et pas une loi telle que l’on peut la définir d’un point de vue scientifique) selon laquelle en se concentrant sur des pensées positives ou des pensées négatives, les gens peuvent apporter des expériences positives ou négatives dans leur vie.

Attention, je ne nie pas que si l’on se rend à un entretien d’embauche, persuadé(e) qu’on n’aura jamais le job, on impacte probablement nos chances d’être retenu(e). Je ne néglige pas non plus l’impact de nos émotions et nos pensées, retranscrites dans nos attitudes et nos interactions, sur la façon dont, en retour, les autres se comportent avec nous. Je suis convaincue qu’exprimer de la gratitude pour les choses positives qui nous arrivent est un très bel outil pour réaliser ce que l’on a plutôt que se focaliser sur ce que l’on n’a pas.

Contrairement à de nombreuses techniques de développement personnel, en psychologie positive, la gratitude est un outil, mais n’est pas une solution miracle. Tout comme le contentement est une ligne de conduite que l’on peut appliquer dans sa vie et sa pratique, dans une certaine limite. 

Au final, la question qui m’est donc apparue à propos du contentement, c’est de réussir à concilier deux idéaux.  Comment peut-on pratiquer le contentement et la gratitude tout en voulant aussi continuer à progresser, se challenger, à changer les choses ou même s’engager dans un combat contre l’injustice et les inégalités ?

Il faut d’un côté apprendre à se satisfaire de ce que l’on a, à ne pas se laisser dévorer par le désir du toujours plus (particulièrement attisé dans nos sociétés capitalistes reposant sur la sur-consommation), à éprouver de la gratitude pour l’émergence de certaines situations ou la présence de certaines personnes dans nos vies.

De l’autre côté, il faut pouvoir reconnaitre son travail et sa valeur, les difficultés qu’on a surmontées, les barrières (liées à  la couleur de peau, la situation sociale, le sexe ou l’orientation sexuelle) qui se dressent contre nous (ou les autres) dans la société. Que l’on soit dans la situation où l’on a dû les faire tomber pour avancer ou à l’inverse qu’on a bénéficié du fait d’être du bon côté.

Pratiquer le contentement en yoga

Pour résoudre ce dilemme, je suis revenue aux fondamentaux et tout simplement aux textes que j’ai déjà cités au début de cet article. 

La pratique de Samtosha selon les niyamas d’abord. Je l’ai comprise comme l’idée de faire ce qui semble juste dans sa pratique pour pouvoir se contenter ensuite de ce qui en émerge. Je ne pratique pas pour “réussir” une posture, même si ma séquence est construite pour amener mon corps à y aller plus facilement. Je pratique pour développer ma capacité à être présente à moi-même. Pour avoir l’occasion de porter mon attention à mon souffle, à mes sensations et à mes émotions. 

Je ne pratique pas pour me transformer ou faire plus (surtout la méditation qui est maintenant prônée comme le moyen d’être plus concentré et donc productif). Je pratique pour mieux me comprendre et me connaitre. Lorsque j’ai compris cela, j’ai arrêté d’envier les personnes qui ont leur position du lotus sans avoir jamais fait de yoga alors que je n’y arrive pas depuis bientôt 14 ans.

Je pratique, sans rien attendre de particulier de cette pratique. Ce qui fait alors le lien à présent avec le concept de détachement du fruit de ses actions selon la Bhagavad Gita. Ce concept a révolutionné ma façon de vivre la pratique du yoga, mais aussi un grand nombre de projets que j’ai entamé dans ma vie.

Écrire un journal de gratitudes

Enfin, j’ai aussi pris l’habitude d’écrire le soir avant de me coucher 3 choses pour lesquelles je suis vraiment reconnaissante (de temps en temps, je mets cette habitude en sommeil, mais je finis toujours par y revenir).

C’est un outil qui ne changera pas les injustices que l’on peut vivre au quotidien et qui n’a pas empêché que j’ai parfois eu besoin d’aide (d’un professionnel) pour traverser les épreuves de la vie que l’on peut tous vivre (comme le deuil). Car peu importe ce que l’on choisit de mettre en place ou pas, le contentement n’a pas vocation à faire disparaître les tracas du quotidien ou les vrais problèmes de société, juste à nous aider à les affronter peut-être un peu plus sereinement.

Le yoga est un outil précieux pour apprendre à se contenter de ce que l’on a, à s’accepter et à nouer une nouvelle relation à soi, en passant notamment par sa relation au corps. En pratiquant régulièrement la gratitude et le contentement, samtosha, on apprend à laisser de côté la frustration, la compétition, la performance et le désir du toujours plus. En pratiquant le yoga dans ce but, on explore nos capacités de résilience et d’acceptation. C’est ce que je vous propose dans mes cours en présentiel et mes programmes en ligne. Si vous souhaitez tester une mise en pratique de ces concepts philosophiques, je vous invite à découvrir mon programme gratuit en 21 jours pour développer plus de conscience corporelle. Il contient des pratiques courtes et efficaces, pour mettre en œuvre les concepts philosophiques majeurs associés à la pratique du yoga, comme la gratitude.

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